La Ligue 1 a tant à se faire pardonner par François Sorton

La Ligue 1 a tant à se faire pardonner par François Sorton

Un Paris Saint-Germain hagard, Lyon instable, Marseille en-dessous de tout, un football décousu du Nord au Sud, une pénurie de buts d’Ouest en Est  : la Ligue 1 saison 2018-2019 devrait nous présenter ses excuses. Elle est si ingrate et contente d’elle qu’elle ne l’a même pas fait.
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Financiarisation
Après avoir fait main basse sur les championnats anglais et espagnol, les fortunés de ce monde et les fonds d’investissement ou de pension mettent le cap sur la France et l’Italie (la législation allemande ne le permet pas). Sept clubs de Ligue1 battent pavillon étranger  : Paris, Marseille, Monaco, Lille, Nice, Bordeaux et en partie Lyon (à hauteur de 100 millions d’Euros par une société chinoise).
Des pays (Qatar pour le PSG, Abu Dhabi pour Manchester City) ou des gens qui ont fait fortune dans le business se croient assez malins pour croire que leur recette est adaptable au football européen. Ils investissent, empruntent beaucoup  ; le phénomène est trop récent pour en deviner les conséquences mais il y a des risques. A force de surenchères sur transferts et salaires, de vivre sur des budgets prévisionnels toujours à la hausse, le réveil pourrait être brutal.
Tous ces nouveaux convertis au football ont un point commun  : ils ne saisissent absolument rien aux subtilités d’un jeu complexe, déléguant à des présidents qui jonglent mieux avec des zéros qu’avec un ballon de foot et font d’un sport qui les dépasse une industrie où rien ne dit qu’ils en sortiront gagnants. S’ils en sortent perdants, c’est le football qui trinquera. «  Le football aux footballeurs  ?  » Pensez-donc, c’est dépassé. On verra…

14 entraîneurs clonés
Six entraîneurs étrangers prendront place sur les bancs de touche ce week-end  : l’Allemand Tuchel (PSG), les Portugais Jardim (Monaco), Villas-Boas (Marseille), Paulo Sousa (Bordeaux), le Brésilien Sylvinho (Lyon) et le Slovène Elsner (Amiens). On compte sur eux pour amener un peu de lumière à la compétition.
On ne vous énumérera pas la liste des 14 entraîneurs français, puisqu’ils ne font qu’un, comme clonés à leur triste philosophie de jeu  : comment s’organiser pour ne pas prendre de but et en marquer un sur coup de pied arrêté, comment faire en sorte de réduire les espaces au maximum en défense pour faire déjouer l’adversaire, en clair comment faire pour gagner 1-0  ?
Une feuille de cigarettes pourrait départager nos entraîneurs si frileux  : Stephan à Rennes est plus audacieux que Der Zakarian à Montpellier, Blaquart à Nîmes laisse un peu de liberté à ses joueurs mais tout cela est très timide. Les entraîneurs français ont un temps de retard  : Guardiola multiplie les recherches tactiques à Manchester City justement pour trouver des espaces où il n’y en a pas et mettre l’adversaire hors de position. Il n’y a qu’un Guardiola, nous sommes bien d’accord, il est unique mais ne vaut-il pas mieux faire du sous-Guardiola que du sous-Deschamps  ?
Est-il folklorique ou insensé de penser que l’efficacité viendra de l’inspiration et de la maîtrise technique plus que de la débauche d’énergie, de l’étalage de ses pectoraux et de son agressivité  ? Deschamps pense que oui, c’est folklorique, alors ils pensent tous que ça l’est puisqu’ils sont contaminés et admiratifs devant le maître champion du monde. Là où ça coince, c’est qu’ils n’ont pas de Griezmann ou de M’Bappé pour sauver la patrie.

Paris cherche opposition
Si Monaco fut un très beau champion 2016-2017 (95 points), ce ne fut qu’une parenthèse dans la chevauchée parisienne, tantôt joyeuse, tantôt barbante. Si personne ne sait à ce jour (même peut-être pas lui) où jouera Neymar, les Parisiens ont suffisamment de marge pour se passer de lui. Marseille nous doit une revanche, Villas-Boas est un bon entraîneur, Lyon essaiera d’avoir plus de haut que de bas, le binôme Sylvinho semble intéressant à découvrir (même si l’éviction de Génésio n’est pas la décision du siècle).
Il n’y a pas de grand chambardement à attendre à priori mais on sait que ce jeu est parfois si déroutant que rien ne se passe comme prévu. «  Il faut garder l’espoir surtout quand tout semble désespéré  », professait le philosophe Sénèque qui s’est pourtant suicidé après cette incantation. Nous n’irons pas jusque là, notre Ligue 1 est notre pain quotidien depuis la nuit des temps. On aimerait juste qu’elle s’offre un lifting.