A la découverte d’un club de village… par Bernard Gourmelen


Le FC Dioulabougou 2 de Dougroupalegnoa 1
A la découverte d’un club de village…
Avec la coopération d’Eric Kaboré et de Dimitri N’Do.

Après avoir présenté deux documents (2) sur le football en Côte d’Ivoire et l’engouement qu’il suscite, il m’a semblé intéressant de poursuivre cette découverte en vous proposant un troisième épisode sur ce qu’est un club, une équipe évoluant dans ce football informel.
Les livres de Bernard Gourmelen ici

Nous voilà, à Dougroupalégnoa qui est une localité du centre-est de la Côte d'Ivoire, appartenant au département de Gagnoa, dans la région du Gôh (ex-région du Fromager). La localité de Dougroupalégnoa est un chef-lieu de commune. Celle-ci est située à environ une quinzaine de kilomètres de Gagnoa après le village de Mahibouo.

C’est à Gagnoa que j’ai rencontré deux de ses jeunes footballeurs, Eric, surnommé par ses coéquipiers Atacabori(3), car évoluant comme avant-centre, il va vite et score souvent et Dimitri, autrement dénommé Chöckyi Iniesta L’Historique.

Bien entendu, c’est suite à l’un des épisodes précédents et en poursuivant nos échanges que nous avons décidé de présenter et d’expliquer ce qu’est leur équipe.

Eric précise d’abord  : "Le nom de notre équipe est Dioulabougou 2 de Dougroupalegnoa. Nous avons donné ce nom à notre équipe car le quartier où nous sommes s'appelle Dioulabougou. Mais, il y a deux équipes dont Dioulabougou 1 et la nôtre, la 2. Nous l'avons créée parce que l'équipe Dioulabougou 1 faisait trop de discrimination entre les jeunes de leurs ethnies et les autres au cas où il y avait des matches importants. C'est donc pour cela que nous avons créé cette équipe, en 2018."


Le jeu se pratique sur cette aire en terre battue au village de Dougroupalégnoa, sorte de Maracaña, où l’on évolue sans gardien de but, entre équipes de six à huit joueurs.


Le terrain de jeu à Dougroupalégnoa.


Les entraînements s‘y déroulent en soirée comme les rencontres du samedi ou du dimanche avec l’assistance d’un coach, Stéphane.

"Nous ne disputons pas de compétitions officielles, juste des tournois au village, ou en inter-villages ou bien encore des rencontres amicales, complète Eric. Mais rajoute-t-il  : Comme je vis à Gagnoa, si je ne peux pas me rendre au village pour m’entraîner, je le fais au lycée avec les copains."


Quand on leur demande pourquoi ils jouent dans cette équipe et pas une autre, ils nous disent comme Eric  :
"Je joue dans l’équipe car le football c’est ma passion mais aussi, et surtout, parce qu’il n’y a pas de discrimination chez nous. La preuve dans notre équipe si on trouve des burkinabés, il y a aussi des maliens et des ivoiriens. On est mieux à jouer ensemble car on a des points communs liés à nos origines comme au jeu que l’on veut pratiquer. Ce à quoi Dimitri complète  : "Je joue là parce que l’équipe est bien organisée. De plus, on a le soutien du voisinage et des parents. L’équipe a un bon comportement qui respecte les joueurs adverses. On a des joueurs talentueux, la balle est toujours jouée à terre."


Le terrain de jeu à Dougroupalégnoa.


Quant à l’équipement emprunté au FC Barcelone, Eric nous explique pourquoi  :
"Nous avons choisi à la majorité les maillots du Barça car cette équipe nous fascine par son sens tactique, la technique de ses joueurs  : tout nous séduit dans cette équipe donc on tente de leur ressembler, même de loin… Nous nous sommes procuré cet équipement à l’aide de notre association, qui consiste à aller nettoyer dans les champs de ceux qui en ont besoin. C’est à l’aide de cet argent que nous avons pu nous procurer ces équipements."

Stéphane, le coach, occupe une place prépondérante comme l’atteste Eric  : "Il est fier de s’occuper de nous, de nous entraîner. Quand il nous voit jouer, il a envie de nous aider. S’il nous dit comment évoluer, il insiste aussi sur notre comportement  : il met en valeur les règles et le fait de les respecter. Et, bien sûr, il nous remonte le moral quand on ne va pas bien. Il nous dit qu’il fait cela pour le plaisir d’être au football."

Propos confirmé par son coéquipier Dimitri qui complète  : Je pense que nous avons bien fait de le choisir comme coach. Il fait un bon placement, c’est ce qui nous permet d’être plus compréhensifs entre nous quand on joue.


Eric nous présente les joueurs de son équipe  :
..Éric, surnommé Atacabori, attaquant de pointe, 19 ans, burkinabé,
..Evariste, surnommé Neymar, attaquant gauche, 19 ans, burkinabé,
..Noël surnommé Le roi du foot, attaquant gauche, 19 ans, burkinabé,
..Moussa surnommé Sissoko, milieu de terrain, 20 ans, burkinabé,
..Augustin surnommé Samuel Etoo, défenseur, 20 ans,
..Madou surnommé Mbappe, milieu de terrain, 18 ans, ivoirien,
..Vincent surnommé Gnama (4), défenseur , 20 ans, burkinabé,
..Abou surnommé Salah, gardien de but, 19 ans, burkinabé,
..Teega surnommé Bertrand, milieu de terrain , 18 ans, burkinabé,
..Dimitri surnommé Chöckyi Iniesta L’Historique , défenseur, 18 ans, burkinabé,
..Chaca surnommé Müller attaquant gauche, ivoirien,
..Gaston surnommé Le silencieux mp3, gardien de but, 19 ans.
..Le treizième joueur de la photographie est reparti dans son pays d’origine, le Burkina Faso.


"On a gagné notre premier tournoi et notre premier trophée dans un tournoi inter-villages en 2019, commente Eric. C’est que confirme Chöckyi Iniesta L’Historique  : Voilà les récompenses après un travail bien fait... Je suis vraiment fier de notre travail, les éléments de Dioulabougou 2. Courage à ceux qui ont perdu  !



Chöckyi Iniesta L’Historique pose avec la coupe gagnée lors d’un tournoi inter-villages.


On peut dire que ces jeunes joueurs connaissent la notion de fair-play, compatissants pour ceux qu’ils ont battu et fiers de leur victoire dans le respect de l’adversaire  !

Notes
1/Les photographies ont été fournies par Eric et Dimitri.
2/ Football, passions ivoiriennes en septembre 2019, puis Paroles de footeux… 1 et 2 en février 2020.
3/ Atacabori en malinké ou dioula signifie : prends et cours…
4/ Gnama en langue du Burkina signifie : L’homme peut passer mais le ballon ne passe pas…