Euro 2021 France et Allemagne: un chassé-croisé, par Loïc Bervas

Les deux équipes, pour leur deuxième match de poule, n’avaient pas changé un joueur, sauf Digne à la place de Hernandez pour la France.

Et pourtant elles ont montré un visage différent  : l’une en bien, l’autre en mal.



Une France méconnaissable

On n’a pas reconnu l’équipe qui avait affiché une maîtrise collective contre la «  Mannschaft  » trois jours auparavant, qu’il s’agisse de la solidité au milieu du terrain et en défense ou d’un jeu plus construit en attaque.

Les Bleus étaient bousculés dès le début du match par l’engagement physique de leurs adversaires portés par un public aussi chaud que la température sur le terrain  : son milieu de terrain n’était pas aussi présent, et sa défense, en particulier Pavard, avait du mal à stopper les Sallai, Fiola et Kleinheisler, encore plus à ressortir proprement les ballons qui revenaient immanquablement dans les 30m français.

La France réussit à sortir de l’étau après 15-20 minutes, jusqu’à la fin de la première mi-temps, mais sa possession du ballon devant des Hongrois jouant plus bas ne fut pas aussi fructueuse que contre l’Allemagne  : Pogba, indolent, n’était pas tranchant, manquait des passes faciles pour lui habituellement, Griezmann n’était pas aussi rayonnant sur le côté qu’au centre du terrain. Et quand ils avaient des occasions, les deux attaquants de pointe les rataient  : Mbappé (tête sur un centre de Benzema, tir après un slalom dans la défense ) et surtout Benzema (tir sur un «  caviar  » de Mbappé). Ce dernier, si prolifique en buts cette année avec le Real, semble inhibé par les attentes qu’a suscitées son retour chez les Bleus.

La deuxième mi-temps était plombée par le but de Fiola marqué dans les arrêts de jeu de la première, après s’être joué de Pavard _ souvent «  enrhumé  » pendant la rencontre_ sur un contre des Hongrois, et de Varane, intervenu trop tard sur l’attaquant hongrois et ne pouvant l’arrêter sans provoquer un pénalty. L’adversaire, menant devant les champions du monde, était bien décidé à rester dans son camp.

Hormis le tir sur le montant de Dembélé entré à la place de Rabiot, qui s’était débarrassé de deux adversaires, le rythme trop lent, le trop grand espace entre les lignes, le déchet technique, et aussi les bonnes parades du gardien Gulacsi _ en particulier sur un tir de Mbappé _ ne permettaient pas à la France de faire mieux que le nul, après l’égalisation de Griezmann sur un centre de Mbappé repoussé par Orban dans les pieds du buteur français.

Quel visage montrera l’équipe de France contre le Portugal  dans son dernier match de la poule? Celui de Munich ou celui de Budapest  ? Il lui faudra retrouver un engagement de tous les instants, une meilleure coordination de son trio magique d’attaquants, une plus juste cohésion entre les lignes et une plus grande précision dans les tirs pour être capable de réaliser les promesses qu’elle a fait naître.

L’Allemagne de retour

Si l’on pouvait comprendre que Deschamps n’ait pas changé la composition de son équipe, Joachim Löw a été courageux de garder la sienne, malgré les pressions. Et il a eu raison.
D’entrée, son équipe prenait la maîtrise du jeu, imprimant du rythme à ses passes, se créant de nombreuses situations. Les Portugais étaient dépassés, leur défense prenait l’eau. Ils l’échappaient belle en voyant le but sur une reprise acrobatique dans un angle fermé de Gosens annulé par la VAR sur hors-jeu.
Ils auraient pu être contrariés par l’ouverture du score par C. Ronaldo, sur un centre parfait de Jota, après un contre ultra-rapide lancé par B. Silva. Mais malgré ce coup du sort, ils maintenaient leur emprise au milieu de terrain, grâce au travail de Kimmich et Gosens sur les côtés, de Gundogan et Kroos au milieu qui prenaient le meilleur sur Pereira et Carvalho. Et rapidement ce pressing intelligent était récompensé par deux buts, tous deux marqués contre leur camp par R. Dias et Guerreiro, en rupture sur des centres appuyés à cause de la menace d’attaquants allemands.

Et cette pression s’accentuait encore en deuxième mi-temps, grâce à un jeu rapide, à une touche de balle bien souvent, et une organisation qui permettait au possesseur du ballon de disposer de solutions diverses, avec un Kroos métronome. Les deux beaux buts qui en découlaient l’étaient sur des actions construites, la balle circulant entre plusieurs joueurs avant des centres pour Havertz lancé, à bout portant, puis Gosens de la tête. Les Allemands, menant 4-1 à l’heure de jeu, se sont-ils un peu relâchés, préservés pour la suite  ? Ils encaissaient un deuxième but sur corner par Juta après un centre de Ronaldo, et voyaient le poteau de Neuer repousser un bolide de R. Sanchez en fin de match.
Ce qui ne remettait pas en cause leur nette supériorité sur les Portugais. Peut-être devront-ils retenir toutefois la leçon des deux buts encaissés  : le premier sur un insuffisant repli défensif sur un contre rapide, le deuxième sur un coup de pied arrêté.